Par rapport à l’entrée directe dans la vie dite active, le cadre des études supérieures offre la possibilité d’un espace d’expérimentation et de mise à l’épreuve entre l’adolescence et l’âge mûr. Une période plus ou moins prolongée s’ouvre ainsi, durant laquelle peut s’organiser une aire de transition, « combinaison d’immaturité prolongée et de précocité provoquée » (E. Erikson, 1972).Si l’université est un cadre qui présente en apparence de nombreux attraits socio-affectifs, notamment en terme de liberté, ce sentiment peut se heurter à la difficulté de maîtriser les contours propres à ce nouvel univers; véritable « passage » au sens ethnologique, avec son « temps d’étrangeté », « d’apprentissage » des règles, voire des rites, l’étudiant devra en décrypter les contours, « s’affilier », et en faire transitoirement son « métier » (A. Coulon, 1997). Dans ce contexte, l’intégration sociale reste déterminante, et le risque d’isolement et de rupture toujours possible.Mais que peut-on dire, spécifiquement, du phénomène de mal-être chez les étudiants ? Essentiellement, qu'il se situe dans un entre-deux : entre les manifestations symptomatiques de l’adolescence, faites d’investissements et de désinvestissements massifs, et la psychopathologie de l’adulte. Ni tout à fait l’un, ni tout à fait l’autre.Si notre société offre aux adolescents et jeunes adultes la possibilité d’un sas aux limites aussi floues que de plus en plus étendues, dans le même temps, le droit à l’erreur académique est limité, tout échec pouvant conduire à une sortie du système sans grande possibilité de retour ultérieur. Ajouté à cela qu’aujourd’hui les jeunes vivent dans un climat de grande liberté, avec pour consigne : « Fais ce que tu veux mais sois performant ! », et nous avons là les ingrédients d’une situation anxiogène non négligeable.